Les doulas sont connues pour accompagner la grossesse, le post-partum, les suites d’une interruption volontaire/médicale de grossesse. A l’autre bout de la vie, certaines doulas apportent leur soutien aux patients dans leur dernier souffle et aux proches confrontés au décès, au deuil. Incipio détaille toutes les aides possibles qui peuvent être prodiguées par ces personnes, qui sont le plus souvent des femmes.

Les doulas de fin de vie, aussi appelées thanadoulas, interviennent au domicile des patients atteints d’une maladie incurable en soins palliatifs, et/ou après le décès pour apporter son soutien aux proches, les aider à accepter la disparition et à poser des mots parfois tabous sur la mort, sur les émotions autour du deuil.

Chaque doula a sa propre approche

En fonction de ses compétences, des sujets sur lesquels elle/il est plus l’aise, et bien sûr des besoins de chaque personne, de chaque famille, la doula peut apporter son soutien sur le plan relationnel (discussions ouvertes, échanges facilités sur les sujets parfois complexes), logistique (courses, ménage, cuisine…) ou encore administratif (gestion des contrats d’obsèques, assurances, banque…). Ce soutien peut être mis en place pour une seule personne ou le groupe (famille, amis). 

Certain(e) doulas sont spécialisé(e)s sur l’accompagnement d’un(e) patient(e) en fin de vie, pour aider le malade et les proches à faire face à la douleur, à l’angoisse de la disparition. Dans certains cas, des conseils peuvent aussi être prodigués sur les questions d’ordre éthique comme la responsabilité de la personne de confiance ou encore les démarches concernant le don et le prélèvement d’organes. Des conseils sur les droits de succession et l’héritage peuvent aussi être délivrés. Au-delà de tous ces points pratiques, la doula peut être bienvenue par sa simple présence, sa bienveillance et sa capacité à écouter, réconforter, tenir compagnie sans être envahissant(e) dans le quotidien des proches confrontés à la maladie incurable à un stade terminal ou  endeuillés.  Et à créer des espaces de parole là où le silence et le déni prennent parfois trop de place.

Enfin, de la même manière que les prêtres, les imams et les rabbins soutiennent religieusement la patient en fin de vie et/ou les proches du défunt, la doula va pouvoir apporter sa touche de spiritualité si elle/il le souhaite. Et si bien sûr un besoin a été formulé en ce sens.

En France, les doulas de fin de vie restent encore rares. Aux Etats-Unis en revanche, le nombre de personnes sensibilisées et formées à cette pratique ne fait qu’augmenter, depuis que la crise sanitaire du Covid-19 a exposé nombre de citoyens à la mort. Ainsi, les instituts ou centres de formation ont essaimé dans le pays pour compter 1 545 personnes (chiffres janvier 2024), contre 260 répertoriés en 2019 par la National End-of-Life Doula Alliance (NEDA). Il s’agit en très grande majorité de femmes. 

Les pays où les thanadoulas pratiquent le plus sont l’Australie, le Canada, le Royaume-Uni et les Etats-Unis. Une pratique facilitée lorsque “les décideurs politiques et les défenseurs des droits de l’homme” trouvent des moyens “pour remédier aux inégalités persistantes en matière de santé maternelle et infantile”, relaient les auteurs d’une étude menée sur le sujet dans les colonnes du Maternal and Child Health Journal. Plusieurs Etats dont la Californie ont d’ailleurs fait le choix de couvrir les frais des services des Doulas par Medicaid (l’équivalent de la Sécurité sociale en France).

Mais qui peut venir doula de la fin de vie ?

Il peut s’agir d’infirmier(e)s, de psychologues, de gérontologues, de gérontopsychologues encore en exercice ou non. Il peut également s’agir de thérapeutes du deuil. Ou toute personne qui, en plus d’avoir un attrait pour le relation d’aide, la fin de vie, la mort et les processus du deuil, dispose de capacités, d’une certification, pour être légitime et bienfaisante à intervenir sur des sujets aussi sensibles. 

Reste que la pratique des doulas de fin de vie n’est pas officiellement réglementée, pas plus que la rémunération, ni aux Etats-Unis ni en France ni à l’échelle mondiale. L‘International End-of-Life Doula Association (INELDA) a formé plus de 5 600 doulas dans le monde, mais avec une forte disparité dans le contenu de ces programmes ne permettant pas de faire consensus sur un socle de connaissances et de pratiques à l’échelle mondiale. “L’INELDA propose par exemple une formation de quarante heures aux fondements du travail des doulas et l’accompagnement des mourants. D’autres programmes de formation proposent des cours en personne de quatre semaines, des cours en ligne de douze semaines, des programmes de six semaines, entre autres formats.” Selon les auteurs d’un travail publié dans la revue Health & Social Care in the Community, “l’absence d’un modèle commercial pour les doulas de fin de vie crée des incohérences entre les services qu’offrent ces accompagnants et les attentes des patients et de leurs familles”. 

En France, sans pour autant que la compétence de doula soit reconnue, l’association Doulas de France propose des formations, une charte des doulas de France, un socle initial de compétences ainsi qu’un annuaire des thanadoulas et doulas de fin de vie

Le risque de dérive reste un sujet de préoccupation de la Miviludes (Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires) qui appelait à la vigilance” dans un rapport concernant les doulas (de la naissance). La Miviludes s’inquiétait précisément du risque de « thérapies alternatives problématiques ».  Le risque, sans tomber dans la paranoïa, est donc celui de la dérive éthique voire sectaire et de recevoir l’aide de quelqu’un de finalement non compétent ou malveillant si elle était passée entre les mailles de toute formation ou d’une formation peu sérieuse. 

Pour lutter contre ce risque de dérive, des études sont menées notamment aux Etats-Unis afin d’améliorer les pratiques et formaliser les certifications en impliquant les doulas, les professionnels de santé, les chercheurs, les défendeurs des droits et les utilisateurs.

Les doulas n’ont aucune compétence médicale ni droit d’exercer un soin

En aucun cas la pratique des doulas de fin de vie n’est associée à une profession de santé, médicale ou paramédicale. Aucun(e) doula de fin de vie n’est en droit d’administrer un médicament, de surveiller des signes vitaux, de donner des conseils ou de prodiguer des gestes d’ordre médical. Aucune valeur, aucun jugement ne doit être délivré par la/le doula qui se doit de maintenir une position neutre malgré le soutien.

Si vos besoins plus spécifiques dépassent le savoir-faire d’un(e) doula, n’hésitez pas à en parler à votre médecin traitant qui saura vous diriger vers un spécialiste de la fin de vie et/ou du deuil si nécessaire. Pour les questions d’ordre plus pratique, certaines associations sont disponibles pour vous aider : Empreintes association dispose par exemple d’une ligne d’écoute et de groupes de parole. Pour en savoir plus sur les associations françaises spécialisées en la matière, n’hésitez pas à consulter l’article INCIPIO consacré à ce sujet.

Pour aller plus loin : lire les “Cahiers francophones de soins palliatifs “Les doulas de la fin de vie : une pratique innovante à découvrir”, écrit par Ariane Plaisance. 

Laura Bourgault

Crédit image: istockphoto/PIKSEL/1307432596

Source

  • National Geographic. Stacey Colino. Voici comment les doulas de fin de vie accompagnent leurs patients vers la mort. Publié le 27 février 2024. En ligne : https://www.nationalgeographic.fr/photographie/culture-societe-deuil-voici-comment-les-doulas-de-fin-de-vie-accompagnent-leurs-patients-vers-la-mort#:~:text=Les%20doulas%20de%20fin%20de%20vie%20travaillent%20avec%20les%20personnes,la%20pand%C3%A9mie%20de%20COVID%2D19.
  • – Rawlings, D., Tieman, J., Miller‐Lewis, L. et Swetenham, K. (2019). What role do death doulas play in end‐of‐life care? A systematic review. Health & Social Care in the Community, 27(3), E82-E94. https://doi.org/10.1111/hsc.12660.
  • – Marshall, C.J., Nguyen, A., Arteaga, S. et al. Building Capacity for Research on Community Doula Care: A Stakeholder-Engaged Process in California. Matern Child Health J 28, 400–408 (2024). https://doi.org/10.1007/s10995-023-03883-2
  • – Miviludes (Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires). Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires. Rapport d’activité 2021. En ligne : https://www.miviludes.interieur.gouv.fr/sites/default/files/publications/francais/MIVILUDES-RAPPORT2021_web_%2027_04_2023%20_0.pdf